Zeitschrift für Sozialforschung

Volume 5, Issue 2, 1936

Hektor Rottweiler
Pages 235-259

Über Jazz

The social function of jazz in its theoretical aspects is the subject of the present article. The author opens his discussion with a technical analysis of jazz music, on the basis of which the social significance of jazz phenomena is elucidated. The peculiar effects of jazz music are by no means limited to the upper layers of society ; they permeate the whole of society. The music has a pseudo-democratic quality, characteristic of the monopolistic phase of capitalism. Jazz music is usually trite, and its orginality, however limited, manifests itself chiefly in the variations of forms in which it is reproduced* The realm of jazz ranges from „salon music“ to the military march* The former expresses a false individualism ; the latter a false collectivism. The Jazz represents a sort of conduit between these two poles, particularly in its form of „hot music“. A theory of jazz will have to dwell especially on this ambivalence. Its meaning is explained by an analogy to eccentric clowns whose inability to obey the norm of regular movement reveals itself finally as a superiority over these rules, which allows the eccentric to play with them. Thus the idea of jazz is to prove that divergence from the norm is observed as a rule throughout the total structure. The pattern of this breaking and observing of the rule at the same time is the syncope. The mechanism of its function is interpreted as a kind of unconscious and paradoxical unity of fear and fulfillment, through obedience and reward by society. The antagonistic character of jazz is expressed by the formula that the „subject of jazz“ permits itself to be annihilated by society in order to feel itself endorsed and vindicated by society. L'article présente certains éléments d'une théorie sociale du Jazz* Il utilise en particulier l'analyse technique, dont les résultats sont interprétés comme expression psychologique de réalités sociales. Le Jazz est défini „phénomène d'interférence“ entre une liberté d'improvisation du sujet, liberté tout apparente, et l'instance sociale à laquelle le sujet est soumis et qui est représenté dans la musique par le rythme et le son fondamentaux rigidement maintenus. Le Jazz lui-même n'est pas irrationnel ou archaïque, il est donné comme tel, il est „fuite du monde des marchandises dans le monde des marchandises“ ; ses traits archaïques sont en tant que tels modernes, c'est-à-dire des régressions psychologiques. C'est pourquoi, précisément en tant que marchandise, il doit se donner à la fois pour ancien et nouveau, original et banal. A l'origine, le produit est banal, originales sont, dans des limites très étroites, les transformations de celui-ci par la reproduction. Mais l'apparente liberté de la reproduction est démasquée par la démonstration qu'elle ne touche pas à la „substance“ banale. Même la rationalisation, en apparence progressive, du processus du travail entre production et reproduction ne correspond pas à la réalité. Particulièrement importante, sur ce point,, est la signification de l'amateur comme représentant du public. Au pôle opposé on trouve la musique d'art d'hier, dépravée et dépouillée de ses éléments progressifs : celle de l'impressionnisme. L'extension du Jazz est limitée par les pôles extrêmes de la musique de salon d'une part, et de la marche d'autre part, celle-là expression d'une illusoire subjectivité, celle-ci expression d'une instance sociale inhumaine. Entre ces extrêmes la „Hot Musique“ prend une position intermédiaire paradoxale et elle s’est stabilisée aujourd’hui en „Jazz classique“. C’est celui-ci que doit considérer en premier lieu la théorie du Jazz. Celle-ci est rapprochée de la figure de 1’ „excentrique“ : de même que l’incapacité de celui-ci d’obéir aux lois du mouvement s’affirme comme un jeu supérieur, ainsi l’idée du Jazz est de démontrer la rupture de la norme — la syncope — à travers toute la structure comme l’achèvement de la norme même. Le mécanisme qui agit dans ce cas, comme dans celui des „steeps“ ralentis (Gehtanz) est de nature érotique : unité d’angoisse, de tentative d’évasion, et d’assouvissement par le fait de trouver dans la société à la fois place et récompense.